"Profiterolier". C'est ainsi que se définit Serge, grand amoureux des profiteroles depuis son plus jeune âge. Depuis une dizaine d'années, il a fait de sa passion son métier. Dans son garage reconverti en laboratoire, Serge a accepté de partager sa recette avec nous.
— Réalisation : Adèle Cailleteau, Julia Mourri | Montage : Richard Adle
"Profiterolier", le mot n’existe pas dans le dictionnaire, mais c’est ainsi que Serge se présente. Son amour des profiteroles remonte à ses jeunes années. Élève au lycée Paul Valéry, dans le 12e arrondissement de Paris, c'est dans son cours d'option cuisine qu'il apprend à faire la pâtisserie. Puis l’oublie pendant toute sa carrière dans l’information de proximité. Jusqu’à ce qu’une amie, il y a une petite dizaine d’années, lui demande s’il peut préparer un dessert à l’occasion d’une fête. Il repense à la recette des profiteroles, apprise quarante ans plus tôt, et se met à l'ouvrage.
Dès lors, alors en âge de prendre sa retraite, va commencer une nouvelle page de sa vie, celle de pâtissier mais également de "profiterolier nomade", ou "profiterolier de la fête". Car Serge aime la fête : on peut croiser son stand de profiteroles "en kits" sur le pont de péniches musicales, à la sortie de festivals de jazz et même lors d’événements dansants en haut de pistes de ski.
Ce n’est pas à la sortie d’un concert que nous le rencontrons mais chez lui, à Bailly (Yvelines), près de Versailles, dans son garage réaménagé en micro-laboratoire de 8m². "Je faisais trop de bruit dans ma cuisine. Ici, je suis tranquille, et ma femme aussi." C’est là que le profiterolier passe le plus clair de son temps, entouré de ses machines : fours, congelo, batteur-mélangeur… Notre hôte est bien équipé. Son critère : que tout cet attirail lui obéisse au doigt et à l'œil. "Aujourd’hui, les machines vous disent ce que vous devez faire. Et ça, c’est pas mon truc !"
Parmi ses "trucs", en revanche, on comprend vite qu'il y a les bons produits. Serge attache une attention particulière à leur sélection et privilégie les circuits courts. Pour la glace, il achète le lait à la ferme près de chez lui ; les farines utilisées dans la préparation du chou viennent des moulins de Versailles.
Dans la confection de la profiterole, la rigueur est de mise. Les quantités sont millimétrées, la cuisson chronométrée, les temps de conservation limités. "Un chou ne se garde pas plus de 12 heures, sinon il n'a plus d’intérêt : autant aller l'acheter chez un marchand de surgelés." Il en va de même lorsqu'il s’agit de se lancer dans une ganache. "Il faut être extrêmement attentif pour que ce ne soit pas cramé. Le chocolat est un produit sensible."
Concentré, l’homme à la moustache blanche se lance dans la préparation du chou — moitié de farine de blé semi-complète, moitié de petit épeautre, du craquelin aux amandes sur le dessus avant d’enfourner le tout. "Ce n’est pas pour le plaisir que je lave la vitre !", met-il en garde : il ne faut jamais ouvrir le four, sinon le chou gonfle et retombe. Pendant que ça cuit, il prépare une ganache bien brillante : chocolat, crème fraîche et un peu de beurre.
La glace enfournée dans le chou, il devient difficile de ne pas saliver lorsque Serge recouvre le tout d’une nappe de chocolat et d'un jeté d’amandes théâtral. "Une petite ?", nous propose-t-il. Et comment ! Cela fait plus de 4 heures que nous sommes dans sa cuisine, le temps a filé. Nous nous installons sur sa terrasse, au soleil, profiterole à la main. "Petit profit", c’est de là que viendrait le mot profiterole, pour désigner de petites boulettes de pain chauffées dans la cheminée, nous explique notre hôte. Le dessert porte bien son nom : "C'est pour moi l’essentiel, de générer un moment de petit plaisir, de petit bonheur, dit-il. Tu fais sourire la personne. C’est pour moi une vraie petite relation, une toute petite."
— Texte : Julia Mourri, Photos : Adèle Cailleteau, Julia Mourri
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